Quand l’extrême droite veut faire taire les récits de la diversité
En plein 2025, des militants d’extrême droite ont mis le feu à des livres sur la diversité et le genre. Un acte qui rappelle les heures les plus sombres de notre Histoire.
(Photo illustration : PXhere)
Il y a des images qui glacent le sang, des gestes qui réveillent les pires fantômes de notre histoire. Cette semaine, sur une plage du Morbihan, des militants d’extrême droite ont mis en scène un autodafé de livres LGBTQ+, mêlant symboles nazis, menaces explicites et insultes homophobes et transphobes.
Oui, en 2025, en France, on brûle encore des livres. Et pas n’importe lesquels : ceux qui parlent de sexualité, de genre, de diversité, ceux qui tentent d’ouvrir l’esprit, de faire grandir la tolérance, de donner une voix à celles et ceux que l’on a trop longtemps voulu faire taire.
"Nous brûlerons vos livres à nouveau." La menace, signée du GUD, groupuscule néofasciste dissous, a été diffusée sur les réseaux sociaux, relayée par La Digue, collectif local tout aussi radical.
Les images sont impensables : des ouvrages arrachés des rayons de la médiathèque de Lanester, déchirés, jetés dans les flammes, le tout sur fond de symboles nazis et de photos du député écologiste Damien Girard, cible de ces extrémistes depuis des mois. Le même Damien Girard qui, dès février, avait demandé la dissolution de La Digue et qui, aujourd’hui, porte plainte, soutenu par la justice qui ouvre deux enquêtes, dont l’une pour apologie de crimes contre l’humanité.
Ce n’est pas un fait divers. C’est un signal d’alarme. Un acte politique, violent, qui s’inscrit dans un climat où l’extrême droite se banalise, où la haine s’exprime sans masque, où la Bretagne elle-même, longtemps réfractaire, voit progresser les idées du Rassemblement national et la multiplication des actes d’intimidation et d’agression.
Les livres visés ? Queer et fières, Vis ma meilleure vie : sexo… Des titres qui, loin d’endoctriner qui que ce soit, offrent des outils pour comprendre, pour dialoguer, pour respecter la pluralité des identités et des parcours. Des livres qui, selon une vaste enquête de l’INED, participent à la construction d’une jeunesse française diverse, inventive, qui bouscule les normes et refuse les assignations d’un autre âge.
Brûler des livres, c’est brûler la liberté de penser, la liberté d’être. C’est s’attaquer à la République elle-même, à ses valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité. C’est désigner des boucs émissaires, jeter en pâture des minorités, et ressusciter les méthodes des régimes les plus abjects du XXe siècle.
Qui ose encore dire que "ce n’est qu’un geste symbolique" ? Les autodafés ne sont jamais anodins. Ils sont le prélude à la censure, à la persécution, à la violence.
Alors, oui, il faut s’indigner, il faut dénoncer, il faut agir. Il faut soutenir les bibliothécaires, les enseignants, les élus qui tiennent bon face à la haine. Il faut rappeler que la France n’est pas, ne sera jamais, le pays où l’on brûle des livres. Et il faut, plus que jamais, défendre la lecture, la connaissance, la diversité. Parce que chaque livre sauvé du feu est une victoire contre l’obscurantisme. Parce que la seule réponse à la haine, c’est la culture, le débat, l’ouverture.
Non, nous ne laisserons pas les pyromanes de la pensée faire main basse sur nos bibliothèques. Non, nous ne laisserons pas l’Histoire se répéter. Parce que brûler un livre, c’est toujours, partout, commencer à brûler des êtres humains.