Pyrénées et crise climatique : baisse drastique de la neige, dangers de la neige artificielle
Les Pyrénées font face à une crise sans précédent alors que les niveaux de neige atteignent un minimum historique, révèle une étude du Centre d'Etudes Spatiales de la Biosphère (CESBIO). Simon Gascoin, scientifique au CESBIO, alerte sur les implications de ce déficit qui s'étend au-delà des stations de ski, touchant également le tourisme, la production hydroélectrique et l'irrigation des cultures.
Le constat est sans appel : la neige dans les Pyrénées est au plus bas depuis 24 ans. Les conséquences de ce phénomène touchent de plein fouet la vie économique et environnementale de la région. Simon Gascoin souligne que le côté espagnol des Pyrénées a déjà subi une baisse significative de la production hydroélectrique nationale en raison du manteau neigeux déficient.
Alors que l'espoir d'une chute de neige est annoncé pour le 9 février avec une prévision de vingt centimètres, cette précipitation reste insuffisante pour compenser le déficit accumulé au fil des années. La situation alarmante met en lumière le défi croissant posé par le dérèglement climatique dans cette région stratégique pour la France, l'Espagne, et Andorre.
Une étude réalisée par des chercheurs grenoblois, publiée dans la revue "Nature Climate Change" en août dernier, pointe du doigt l'utilisation de la neige de culture comme solution miracle. Hugues François, principal auteur de l'étude, explique sur “France Bleu Isère” que “la production de neige a un impact réel sur le manteau neigeux, mais ce n'est pas une solution générique qu'on pourra appliquer à toutes les stations”.
Les chercheurs ont modélisé le climat futur dans 2 234 stations de ski européennes, démontrant que dans un monde à +2 degrés sans neige de culture, la moitié de ces stations seraient confrontées à un risque "très élevé" de manque de neige. Cependant, l'utilisation de neige artificielle réduirait cette proportion à 27%, mais avec des conséquences environnementales majeures.
Hugues François met en garde contre l'impact de l'investissement dans l'enneigement artificiel sur la capacité d'adaptation des stations au réchauffement climatique. La consommation d'eau nécessaire à la production de neige de culture pourrait augmenter de 8 à 25%, voire davantage si le réchauffement climatique dépasse les 2 degrés.
Le chercheur soulève également une question cruciale : le changement climatique force à s'interroger sur le souhaitable et le faisable. Dans certaines stations d'altitude, la production de neige de culture peut être maintenue à long terme, mais est-ce vraiment souhaitable dans une perspective écologique ?
Alors que les Pyrénées plongent dans une crise sans précédent de pénurie de neige, l'urgence pressante d'explorer des solutions viables semble être largement ignorée. Les répercussions tangibles du dérèglement climatique exposent des défis complexes qui nécessitent des réponses non seulement éclairées mais aussi d'une urgence alarmante.
La réalité climatique inquiétante interpelle sur la conscience des élus et des professionnels de la montagne.
Ont-ils des objectifs à moyen et long termes ou préfèrent-ils adopter une attitude fataliste ?
Ces interrogations surgissent lorsque l'on constate, année après année, la prolifération des canons à neige sur les domaines skiables, comme si le dérèglement climatique n'était qu'une menace lointaine. Des stations des Pyrénées, telles que celle de Luchon-Superbagnères, proposent des domaines skiables recouverts à 70% par la neige de culture, jetant ainsi le doute sur la prise de conscience réelle des enjeux. Face à cette réalité criante, la question subsiste : sommes-nous condamnés à l'indifférence jusqu'à ce que la catastrophe ne soit inévitable ?
(Photo : Luchon-Superbagnères, ce lundi 5 février 2024 : Capture écran webcam)