Luchon face à la loi sur les locations touristiques : un espoir pour les hôteliers ?
Cette nouvelle loi a été adoptée ce jeudi 7 novembre par les députés afin de limiter l'impact des meublés de tourisme sur le marché locatif. Mais rassurera-t-elle les professionnels luchonnais ?
Face à l'explosion des locations touristiques, dont le nombre est passé de 300 000 en 2016 à 1,2 million aujourd'hui, une loi a été adoptée pour freiner cet essor et répondre aux préoccupations locales.
Portée par les députés Annaïg Le Meur (Renaissance) et Inaki Echaniz (PS), la proposition a été approuvée ce jeudi 7 novembre par le Parlement après des mois de débats mouvementés.
Objectif : limiter l'impact des meublés de tourisme sur le marché locatif et offrir aux maires les outils nécessaires pour agir localement.
Des outils renforcés pour les communes
Parmi les principales mesures, les communes comptant plus de 20 % de résidences secondaires pourront, en ajustant leur Plan local d'urbanisme, réserver des zones uniquement pour des résidences principales.
Pour Annaïg Le Meur, cette disposition “va ramener de la vie dans les villages” en facilitant l’accès au logement pour les habitants.
Autre changement notable : l’enregistrement des meublés de tourisme, jusque-là en vigueur dans certaines grandes villes, sera étendu à toutes les communes.
En instaurant un quota pour ces logements, les municipalités pourront mieux contrôler leur nombre et leur utilisation.
Enfin, les maires auront la possibilité de réduire la durée maximale de location pour les résidences principales de 120 à 90 jours, limitant ainsi les possibilités de location saisonnière.
Diagnostic de performance énergétique (DPE) et fiscalité révisée
Un autre point de friction a été levé concernant le DPE, qui sera désormais obligatoire pour les meublés de tourisme.
En particulier, les logements classés E ne pourront plus être loués à court terme, et les propriétaires auront dix ans pour réaliser les travaux de mise aux normes énergétiques.
Côté fiscalité, les avantages des locations touristiques seront alignés sur ceux des locations classiques.
Ainsi, les abattements actuels de 71 % pour les meublés de tourisme classés et de 50 % pour les locations type Airbnb seront abaissés respectivement à 50 % et 30 %.
Cette mesure vise à réduire l'écart fiscal entre locations longue et courte durée, incitant les propriétaires à opter pour la première.
Réactions des plateformes et des experts
Airbnb, en première ligne, n’anticipe pas de conséquences majeures pour son activité, mais regrette “l’addition de nouvelles contraintes fiscales et administratives” qui pourraient pénaliser les particuliers.
Pour les experts fiscaux, cette loi impactera surtout les petits loueurs sous le régime simplifié du micro-BIC, qui verront leur imposition augmenter.
Vers un durcissement ?
Malgré cette avancée, les co-auteurs du texte avaient espéré aller plus loin. Deux propositions, en discussion dans le Projet de loi de finances 2025, pourraient toutefois renforcer l’impact de cette réforme :
une augmentation de la taxation sur la plus-value pour les meublés non professionnels
et un accroissement de l’amortissement fiscal pour les locations nues.
Après plus d'un an de péripéties législatives, cette loi marque un tournant dans la régulation des locations touristiques en France.
Une réponse aux enjeux d'un secteur en plein essor, mais aussi une première étape pour rééquilibrer le marché du logement.
Les professionnels luchonnais rassurés ?
Après l’adoption de cette loi, j’ai demandé à Jean-Christophe Gimenez, hôtelier à Luchon, s’il pensait que le marché du tourisme locatif allait se réguler :
Non, ça ne changera rien. J’étais pessimiste avant la loi, je le suis après son adoption ce jeudi. Pour Luchon, il fallait réagir depuis longtemps. On a laissé filer et la situation est catastrophique. Cette loi, hélas, ne changera pas grand chose… Peut-être elle va sauver 4 ou 5 professionnels, donc de ce côté, c’est un peu positif… cela vaut le coup de se battre, mais je le redis, sans une volonté politique forte, rien ne peut changer… Cette loi va aider à libérer quelques locations à l’année mais ne règlera pas les problèmes de l’hôtellerie. Pour sauver les hôtels, il faut les avantager fiscalement en jouant sur la taxe foncière…
Et Jean-Christophe Gimenez de rappeler :
Ce qui nous tue, ce sont les normes, le prix de l’énergie et un taux de remplissage trop faible pour faire face à ces charges ! Aucun hôtel ne peut tenir à long terme, avec un remplissage correct sur seulement 3 mois dans l’année. Tous les hôteliers qui vendent actuellement n’ont aucun professionnel intéressé par une reprise. Seuls les promoteurs semblent intéressés à des tarifs très bas environ 600 € le M² (ils revendent 5000 € le M² après travaux).
Tout en pointant la situation particulière de la cité thermale :
Les problématiques de l’hôtellerie luchonnaise datent de plusieurs décennies. La municipalité hésitera à surtaxer les résidences secondaires, électorat oblige… Les finances de la ville étant contraintes, un abattement supplémentaire sur la taxe foncière semble improbable. Pourtant avec tous ces nouveaux logements en construction le revenu de cette taxe va augmenter pour notre ville…
Et de conclure :
Il faut relancer la destination avec plus de tourisme et de curistes pour augmenter les taux de remplissage…