Luchon en haut du classement Airbnb : chance ou leurre ?
La cité thermale cartonne sur Airbnb cet été, mais ce succès masque une réalité plus complexe pour les professionnels du tourisme local.
((Photo © Jean-Baptiste Higounet)
Samedi, je relayais une information factuelle : Luchon figure dans le Top 10 des destinations les plus recherchées sur Airbnb pour l’été 2025. Une annonce flatteuse, à première vue, qui semble consacrer la popularité grandissante de notre ville thermale.
Mais avec un peu de recul, ce classement invite surtout à une réflexion plus critique : car derrière ce regain d’intérêt touristique se cache une transformation plus profonde — et parfois inquiétante — de nos territoires, où le tourisme, sous couvert d’authenticité, tend à marginaliser les professionnels locaux et à transformer nos villes et villages en vitrines standardisées.
Clés cadenassées et serrures connectées
Dans de nombreuses villes, on connaît déjà les conséquences. À force de multiplier les locations courte durée, Airbnb a transformé des centres historiques en vitrines aseptisées, où les habitants ont cédé la place aux valises à roulettes et aux cohortes de boîtes à clés métalliques. Ce qui arrive à Lisbonne, Venise ou Barcelone, arrive désormais à Luchon, Grignan ou Marciac – en version rurale.
Les façades restent jolies, les ruelles sentent encore le pin et la pierre, mais l’âme des lieux s’efface. Finis les accueils chaleureux, les petits-déjeuners partagés en chambre d’hôtes, les conseils avisés des hôteliers. On récupère une clé, un code, un check-in automatique. Bienvenue dans l’ère du tourisme sans contact… ni rencontre.
Une alternative au pouvoir d’achat en berne ?
Il faut l’admettre : dans une France où le pouvoir d’achat vacille, ces destinations “bon marché” offrent une solution concrète pour partir sans se ruiner. Luchon devient, pour beaucoup, une alternative à des séjours à l’étranger devenus inaccessibles. Cela, personne ne le conteste.
Mais faut-il pour autant applaudir une dynamique qui repose essentiellement sur des plateformes américaines, qui contournent une bonne partie des règles fiscales, sociales et environnementales du secteur touristique traditionnel ?
Car pendant que les propriétaires maximisent leurs rendements locatifs, les hôteliers et les gérants de gîtes voient fondre leur part du gâteau.
Les professionnels délaissés
À Luchon comme ailleurs, les hôtels familiaux, les gîtes et les chambres d’hôtes ne sont pas juste des hébergements : ce sont des lieux de vie, de rencontre, d’emploi local. Ce sont eux qui emploient, forment, investissent. Ce sont eux aussi qui, bien souvent, accueillent les clientèles les plus fidèles, celles qui reviennent chaque année, pour l’ambiance autant que pour la montagne.
À l’inverse, les logements Airbnb sont trop souvent transformés en simples produits de rente. Ils échappent au tissu économique local, privatisent une partie de l’espace urbain, et tirent les prix de l’immobilier vers le haut. Résultat : les jeunes du cru ne peuvent plus se loger, et les professionnels du tourisme peinent à rivaliser avec des tarifs défiant toute concurrence… sans service.
Vers un surtourisme rural ?
La question du surtourisme ne se limite plus aux grandes métropoles. Quand des centaines de visiteurs affluent en même temps dans une vallée de montagne au réseau routier étroit et aux infrastructures limitées, les tensions montent. Épuisement des ressources, encombrements, pression sur l’environnement : la montagne n’est pas infinie.
Alors non, ce classement n’est pas une “bonne nouvelle” en soi. Ou du moins, pas une nouvelle qu’on peut accueillir sans nuance, sans question, sans vigilance.
Luchon, comme tant d’autres perles rurales, mérite mieux qu’un engouement éphémère porté par des algorithmes. Elle mérite un tourisme pensé pour durer, pour vivre, pour faire vivre. Et pas seulement pour “performer”.
Car si Airbnb fait aujourd’hui monter Luchon dans un classement, rien ne dit qu’il en assurera l’avenir. Le jour où les algorithmes tourneront leur regard ailleurs, qui restera pour faire vivre les saisons creuses ? Qui sera là, quand les professionnels, découragés, auront fermé boutique ?
Il appartient à chacun — élus, habitants, voyageurs — de réfléchir à ce que nous voulons vraiment pour nos territoires : un tourisme à court terme, à bas prix, sans lien ni ancrage, ou une économie locale durable, fondée sur la rencontre, la qualité et le respect du lieu ?
Le classement fait peut-être briller Luchon cet été. Mais la vraie question, c’est : et après ?
Bonjour Paul ,
Par expérience, nous n'avons pas plus de demandes a cause du tour que durant toute l'année .
Quant a l'accueil , même avec un distributeur de clefs , on peut choisir le contact ,c'est que privilégie notre fille qui a justement des félicitations à ce sujet : le présentiel,le téléphone, le courriel chaleureux et pas administratif des offices de tourisme .... qui se sont " prifessionalises au detriment des bénévoles amoureux de leurs communes .
Le bon accueil engendre aussi la fidélité
Excuse les fautes de frappe mais je vois à peine ce que j'écris 😄🥲
Bon dimanche !
Nadyne
Oui un questionnement complexe ..Pour les professionnels du tourisme local « la vraie question » c’est aussi dans une approche non massifiée de 4 saisons de concilier dans le bassin de la cité thermale notamment les intérêts suivants:
- Professionnalisme reconnu
- Qualité / prix d’hébergement
- Embauche de qualité durable
- Accès aux nouveaux outils numériques
- Diversité des niveaux d’accueil
- liste non exhaustive
Avec un haut niveau d’exigence des clientèles .