Hyperconnectés, mais déconnectés du réel
Entre stress, fatigue et écrans omniprésents, notre capacité à être pleinement présents s’effrite. Ces oublis ne sont pas des accidents : ils sont les symptômes d’un monde en surchauffe.
Parfois, ce n’est pas la violence qui frappe. C’est l’oubli. Un oubli si banal qu’il en devient vertigineux. Une femme laissée sur une aire d’autoroute, un enfant enfermé dans une voiture, un brasero qui sème le feu sur douze kilomètres. Des histoires qui, mises bout à bout, dessinent les contours d’une époque saturée, où l’attention se dissout dans le bruit du monde.
La pause qui vire à l’oubli
Vendredi 4 juillet, quelque part entre Paris et le Maroc. Un homme de 62 ans s’arrête sur une aire d’autoroute près d’Orléans. Il voyage avec sa femme et leur fille de 22 ans. Il descend aux toilettes. Sa femme aussi. Leur fille dort à l’arrière. Puis il repart. Sans elle.
Ce n’est qu’à 8h30, après plus de 300 kilomètres, qu’il réalise son absence. Panique. Appel aux gendarmes. Grâce à son téléphone, elle est localisée sur l’aire de Pamproux, dans les Deux-Sèvres. Elle attendait depuis 4 heures du matin, seule, sous les néons d’un parking désert.
Les gendarmes confirment : ce n’est pas une fugue, ni une dispute. Juste un oubli. Un moment de flottement dans une vie trop remplie.
Le cirque et l’enfant
À Revel, en Isère, un autre oubli. Un enfant de deux ans, laissé dans une voiture en plein soleil pendant que ses parents assistent à un spectacle de cirque. Une heure et demie. Les responsables du parking les alertent. Ils reviennent, brièvement, puis repartent. Le spectacle continue.
Les gendarmes interviennent. L’enfant est sauvé. Les parents, convoqués. Ils ne comprennent pas. Ils ne veulent pas comprendre. Le divertissement a pris le dessus. L’attention, elle, s’est évaporée.
Le brasero qui sème le feu
Un dimanche après-midi, sur la RD613 entre Montredon-des-Corbières et Thézan. Sept départs de feu. Une autoroute coupée. Un camping évacué. À l’origine : un brasero encore chaud, transporté sur une remorque par un commerçant rentrant d’un marché.
Les braises s’échappent, s’éparpillent sur douze kilomètres. Le feu se propage. L’homme ne s’est rendu compte de rien. Il pensait à autre chose. À ses ventes, à son trajet, à son téléphone peut-être.
Le drame d’Istres
Jeudi 26 juin, sur la base aérienne d’Istres. 36 degrés. Vigilance orange canicule. Un enfant de deux ans est retrouvé mort dans une voiture. Son père l’a oublié. Il travaille sur la base. Civil ou militaire, peu importe. Il avait sans doute mille choses en tête.
Le petit garçon est mort d’un arrêt cardio-respiratoire. Le père est placé en garde à vue. L’enquête parle d’homicide involontaire. Le procureur évoque un drame. Mais ce drame, il est aussi collectif.
Une époque distraite
Ces histoires ne sont pas des anomalies. Elles sont les symptômes d’une société en surchauffe. Une société connectée, pressée, saturée. Où l’on oublie sa femme, son enfant, les braises d’un feu. Où l’on pense à tout, sauf à l’essentiel.
Les smartphones nous localisent, mais nous éloignent. Les réseaux nous relient, mais nous dispersent. Le stress nous pousse à avancer, sans regarder derrière. Les pauses deviennent des pièges. Les spectacles, des bulles d’oubli.
Et nous ?
La femme de Pamproux a été récupérée. L’enfant de Revel a été sauvé. Celui d’Istres, non. Le brasero a été éteint, trop tard. Et nous, que faisons-nous ? Nous continuons. Nous roulons. Nous scrollons. Nous oublions.
Peut-être faudrait-il s’arrêter. Vraiment. Couper le moteur. Éteindre l’écran. Regarder autour. Se souvenir.
Le monde devient un peut plus chaque jour ,de plus en plus fou ,c'est très clair, et réel !