Guerre d'Algérie : Emmanuel Macron reconnaît que le dirigeant du FLN Larbi Ben M'hidi a été "assassiné par des militaires français" en 1957
Une reconnaissance de la responsabilité française qui intervient à l’occasion du 70e anniversaire du début de la guerre d’Algérie, le 1er novembre 1954.
{Groupe des six », chefs du FLN. Photo prise juste avant le déclenchement de la Guerre d'Algérie, le 1er novembre 1954 (debout, de gauche à droite : Rabah Bitat, Mostefa Ben Boulaïd, Didouche Mourad et Mohamed Boudiaf. Assis : Krim Belkacem à gauche, et Larbi Ben M'Hidi à droite).} (Photo Ministère algérien des Moudjahidines/ Wikipedia)
Soixante-dix ans après le début de la guerre d’Algérie, le président de la République, Emmanuel Macron, a officiellement reconnu, ce 1er novembre, la responsabilité de la France dans l’assassinat de Mohamed Larbi Ben M’hidi, figure emblématique de la lutte pour l’indépendance algérienne et l'un des fondateurs du Front de libération nationale (FLN).
C'est la première fois que l’État français dément publiquement la version officielle de son suicide, un récit qui n’avait jamais été remis en question depuis 1957, bien que le général Paul Aussaresses ait avoué en 2001 l’avoir pendu en pleine bataille d’Alger.
Figure de l’indépendance algérienne, Ben M’hidi incarnait un idéal politique et révolutionnaire.
“C’était l’idéaliste révolutionnaire, le politique, le théoricien... Il négligeait les supports militaires”, écrivait à son sujet Yves Courrière dans Le temps des léopards.
Souvent appelé le Jean Moulin algérien pour son rôle et sa symbolique, il est aujourd’hui un emblème de la lutte pour l’indépendance.
Communiqué de presse de l’Elysée du 1er novembre 2024
Commémoration du 1er novembre 2024 - 70ème anniversaire du déclenchement de l'insurrection du 1er novembre 1954.
“Ce 1er novembre marque le 70e anniversaire de l’insurrection du 1er novembre 1954 qui ouvrit la guerre d’Algérie et s’acheva par l’indépendance de l’Algérie.
Depuis 2017, le Président de la République, a entendu regarder l’Histoire de la colonisation et de la Guerre d’Algérie en sa vérité, dans le but d’aboutir à la constitution d’une mémoire apaisée et partagée. Cette ambition, dont l’acte fondateur est la Déclaration commune d’Alger, est aussi celle du Président TEBBOUNE.
Le président de la République considère que le travail de vérité et de reconnaissance doit se poursuivre.
Il reconnait ce jour que Larbi BEN M’HIDI, héros national pour l’Algérie et l’un des six dirigeants du FLN qui lancèrent l’insurrection du 1er novembre 1954, a été assassiné par des militaires français placés sous le commandement du général AUSSARESSES.
Larbi BEN M’HIDI, était né en 1923 dans le Constantinois, y avait obtenu un certificat d’études et poursuivit ses études dans le secondaire. Il s’était engagé dans les scouts musulmans puis était devenu militant nationaliste. Les massacres du Constantinois en mai-juin 1945 le renforcèrent dans ses convictions en faveur de l’indépendance de l’Algérie. Après le lancement de l’insurrection, il fut chargé de l’Oranie avant de devenir l’architecte du premier congrès du FLN, tenu dans la vallée de la Soummam le 20 août 1956. Ce congrès fonda le programme de ce nouveau parti, donnant la priorité à l’action politique et au renforcement des maquis de l’intérieur.
Désigné responsable de la Zone autonome d’Alger en 1956, il fut ainsi l’un des principaux acteurs de « la bataille d’Alger » lancée en janvier 1957, où se conjuguèrent, selon la phrase d’Albert CAMUS, « les noces sanglantes du terrorisme urbain contre les civils et de la répression de l’armée ».
Comme le Président de la République l’a déjà reconnu pour Maurice AUDIN et Ali BOUMENDJEL, cette répression s’accompagna de la mise en place d’un système hors la société des Droits de l’Homme et du Citoyen, rendu possible par le vote des « pouvoirs spéciaux » au Parlement, donnant carte blanche au Gouvernement pour rétablir l’ordre en Algérie et permettant l’adoption d’un décret autorisant la délégation des pouvoirs de police à l’armée, décliné par arrêté préfectoral, d’abord à Alger, puis dans toute l’Algérie, en 1957.
Dans ce contexte, parmi les très nombreuses personnes, innocentes ou coupables, qui furent arrêtées figurait Larbi BEN M’HIDI.
Les images prises de lui lors de son interpellation en février 1957 le montrent menotté mais souriant, le regard fier. Les militaires français qui le connaissaient de réputation furent impressionnés par son charisme et son courage. Ainsi, les hommes du 3e Régiment de parachutistes coloniaux du colonel BIGEARD se mirent au garde-à-vous et lui présentèrent les armes.
Celui-ci est officiellement remis au commandant AUSSARESSES qui est chargé de trouver un endroit sûr où le garder. Officiellement, Larbi BEN M’HIDI tenta de se suicider en cachette de ses gardiens. Officiellement, il décéda au cours de son transfert à l’hôpital. Mais cette version fut aussitôt contestée, comme elle l’a été pour Ali BOUMENDJEL et Maurice AUDIN, tant en Algérie qu’en France. Au début des années 2000, le Général AUSSARESSES avoua enfin qu’il l’avait assassiné.
En 2002, le Général BIGEARD projeta même de se rendre à Alger afin d’y déposer une gerbe en hommage à Larbi BEN M’HIDI, déclarant alors : « Quand on se bat contre un ennemi de valeur, il naît souvent une camaraderie ».
La reconnaissance de cet assassinat atteste que le travail de vérité historique, que le Président de la République a initié avec le Président Abdelmadjid TEBBOUNE, se poursuivra. C’est le rôle dévolu à la commission mixte d’historiens, mise en place par les deux chefs de l’Etat, et dont le Président de la République a validé récemment les conclusions.
C’est aussi en pensant aux générations futures que le chef de l’Etat se fait devoir, encore et toujours, de chercher les voies de la réconciliation des mémoires entre les deux pays.”
(Mohamed Larbi Ben M'hidi / Photo : Wikipedia)
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