Des dizaines de milliers de morts, mais personne ne regarde : Soudan, la guerre fantôme
Des millions de déplacés, des dizaines de milliers de morts, des crimes de guerre à répétition : au Soudan, la barbarie est quotidienne. Et pourtant, elle ne dérange personne.
(Camp de réfugiés soudanais au Tchad. Photo : Henry Wilkins/VOA / Wikipedia)
Deux ans déjà. Deux ans que le Soudan s’enfonce dans une guerre civile qui ne dit pas son nom — ou plutôt, que plus personne ne prononce. Tandis que l’attention médiatique et diplomatique reste focalisée sur l’Ukraine et Gaza, un pays de 48 millions d’habitants est broyé dans un silence presque coupable. Bombardements d’hôpitaux, viols utilisés comme arme de guerre, famine organisée…
Plus de 12 millions de déplacés, des dizaines de milliers de morts — peut-être cent mille, peut-être plus : qui compte encore ?
Depuis le 15 avril 2023, les Forces armées soudanaises (SAF) du général Abdel Fattah al-Burhan affrontent les paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF) de Mohamed Hamdan Dagalo, dit "Hemetti".
Une rivalité de chefs qui a mis fin à l’espoir né, un temps, de la chute d’Omar el-Béchir en 2019. L’histoire est connue des chercheurs et de quelques diplomates, mais elle n’intéresse plus guère les rédactions. Rien ne semble devoir forcer le monde à regarder ce drame droit dans les yeux.
"Même la guerre a des règles. Mais ici, au Soudan, ces règles sont violées jour après jour."
Kristine Hambrouck, responsable du Soudan pour le HCR. (France Info)
Une crise humanitaire hors d’échelle
Les chiffres donnent le vertige. Plus de la moitié de la population soudanaise a besoin d’aide. Près de trois millions de réfugiés ont déjà franchi les frontières vers le Tchad, l’Égypte ou le Sud-Soudan, lui-même exsangue et privé de 90 % de ses recettes pétrolières après l’effondrement d’un pipeline stratégique. Dans les camps, la famine frappe, l’eau manque, les épidémies rôdent. Et ceux qui restent survivent dans des villes éventrées où les hôpitaux sont transformés en cibles militaires ou en butin de guerre.
Dans l’ombre de la brutalité, les RSF mènent une politique de la terreur. Selon l’Armed Conflict Location and Event Data Project, ces forces sont responsables de 77 % des violences contre les civils recensées en 2024. Amnesty International dénonce l’usage systématique du viol comme arme de guerre pour "humilier, punir, contrôler, terroriser et déplacer". Crimes de guerre, crimes contre l’humanité — les mots sont là, les images manquent.
Un conflit qui déborde déjà
Dans la torpeur diplomatique, chacun arme son camp. L’armée soudanaise reçoit des armes et un soutien technique de l’Égypte, de l’Iran et de la Turquie. En face, les RSF bénéficient de livraisons émiraties, souvent via le Tchad. À mesure que le front se fige, les armes et les combattants menacent de déborder vers la Libye, la Centrafrique et le Sahel, propageant l’instabilité comme un incendie mal éteint.
"On assiste à une politique de la terreur pour contrôler des populations hostiles. Toutes les violations possibles des droits de l’homme se retrouvent ici."
Roland Marchal, chercheur spécialiste du Soudan (France Info)
À quand le sursaut ?
Dans la confusion, une seule certitude : ce drame n’est pas une fatalité. Mais à défaut de caméras braquées et de débats parlementaires fiévreux, qui exigera des comptes ? Qui imposera des corridors humanitaires ? Qui menacera de sanctions les fournisseurs d’armes ? Pour l’instant, au Soudan, la guerre se poursuit comme un mauvais son coupé.
Pendant ce temps, à Khartoum, à Al-Fasher, dans le Darfour, on meurt, on fuit, on se tait.
Et le monde regarde ailleurs.
c'est la tristesse et ce n'est pas de maintenant ,
avec notre petite canicule, tous le monde en fait un fromage , et si nous étions a la place de tous ces pauvres gens , mais chacun pense a sa petite vie confortable , dès qu'il fait froid ou chaud c'est le drame !